En effet, lorsqu'on étudie la naissance et le développement de la réflexion théologique dans le Nouveau Testament, on peut, de manière schématique, proposer le cheminement suivant. Sans doute, comme on le dit souvent, tout s'enracine-t-il dans l'affirmation de la résurrection du Christ. Mais ce qui va orienter, de manières diverses, les théologies du Nouveau Testament c'est le sens que chaque écrit donne à la croix du Christ. S'agit-il d'un sceau d'authenticité apporté par Jésus pour confirmer la nouvelle loi, ou bien d'un exemple donné aux hommes face à la mort, ou bien d'un sacrifice offert pour les péchés, ou bien s'agit-il de la révélation de l'être réel du Fils de Dieu, et donc de Dieu le Père ? Si on adopte la première position, on restera dans la perspective de la Loi. Si on adopte le dernier point de vue, c'est une autre figure de Dieu qui se révèle ; un nouveau chemin s'ouvre alors devant l'homme pour rencontrer Dieu ; ce chemin c'est la foi.
Or il se trouve qu'assez rapidement dans le développement de la théologie paulinienne le "langage de la croix" (1 Co 1,18) prend une importance considérable. Sans doute faudrait-il ici analyser les diverses présentations qui en sont faites : la croix comme abaissement et kénose, la croix comme folie, la croix comme sacrifice. Ce dernier thème est-il à prendre comme un énoncé théologique ou une métaphore expressive ? Quelle présentation convient-il de privilégier ? Nous étudierons ce problème à propos de Rm 8. Pour le moment soyons attentifs aux textes qui précèdent l'épître aux Romains, à savoir spécialement Ph 2 et 1 Co 1, où nous rencontrons une étonnante compréhension de la croix.