En effet Mt 10,40-42 semble indiquer que la communauté matthéenne ayant à sa tête un "prophète" comprend des "justes" (sans doute des juifs devenus chrétiens et continuant à pratiquer la Loi) et des "petits" (sans doute des païens devenus chrétiens). Si ces interprétations sont exactes, Paul utiliserait bien ces manières de parler, mais au lieu d'appliquer aux chrétiens d'origine païenne un qualificatif peu gratifiant, il renvoie cette formule aux juifs devenus chrétiens tout en restant soumis à la Loi. Ce procédé se rencontre peut-être en Ph 3,2 où Paul retourne aux judaïsants un terme de mépris qu'ils utilisaient pour désigner les païens.
Est-il possible de dire qu'ici Paul accepte un compromis, qu'à côté de la liberté propre à la foi il admet la validité, pour les chrétiens d'origine juive, d'une vie chrétienne soumise à la Loi mosaïque ? Il ne faut pas confondre ici le niveau des principes objectifs avec le niveau de la charité. D'une part Paul affirme clairement en 14,14 : "Je le sais, j'en suis convaincu par le Seigneur Jésus : rien n'est impur en soi" (cela semble même s'appliquer aux prescriptions de l'Assemblée de Jérusalem !). D'autre part "c'est un devoir pour nous, les forts, de porter l'infirmité des faibles" (15,1) sans les juger, ni les mépriser.