Conclusion : Plaidoyer pour Paul
Paul, l'avorton, le provocateur, l'écrivain à la pensée volcanique, a connu autant de défaites que de succès, et sans doute plus de critiques que d'approbations. De son vivant, chassé de ville en ville, jalousé par certains frères (voir Ph 1,14-17), sévèrement rappelé à l'ordre par la communauté de Jacques (Ac 21,17-25), à certains moments abandonné de tous (voir 2 Tm 4,16), il puise dans son dynamisme de quoi donner le change. Avant ou après sa mort ses lettres sont conservées, réunies, lues avec respect, cependant des disciples plus ou moins fidèles ont peut-être introduit dans ce Corpus des ajouts qui atténuent la rigueur et la cohérence de la pensée paulinienne ; nous faisons allusion aux interpolations possibles ou probables en 1 Co 10,1-22 ; en 1 Co 14,34-38, à la rédaction des Pastorales. Selon 2 P 3,15-16, dès la fin du 1er siècle on essaie d'imposer aux textes de Paul une interprétation déformée. Apparemment à cette époque, avec la disparition du courant judaïsant, Paul triomphe ; cependant l'influence diffuse des courants judéo-chrétiens essaie de corriger les "excès" de Paul et d'orienter la pensée et l'organisation des communautés chrétiennes vers quelque chose de plus raisonnable. Cette tension se retrouve aux 2ème et 3ème siècles ; d'un côté les chrétiens tâtonnent pour se situer et pour comprendre l'originalité de la foi chrétienne : troisième race, athées (sans temple, sans statue des dieux, sans sacrifice), adeptes de la vraie gnose et de la vraie philosophie (voir le titre complet des Stromates de Clément d'Alexandrie tel qu'il est transmis par Eusèbe, Hist. Eccl., VI,13,1 : Stromates de Mémoires gnostiques selon la vraie philosophie ).