Cet hymne trouve son parallèle et son complément en 1 Corinthiens 1,18-25, où Paul souligne la rupture entre le logos tou staurou ("le langage de la croix") et l'image que le Juif et le païen se font de Dieu, de son envoyé et du salut. On pourrait commenter et expliciter ces affirmations en disant : le Christ était la Promesse vivante, l'alliance vivante. Les hommes, Juifs et Romains confondus, l'ont déchiré : l'alliance est morte ; elle est remplacée par la gratuité parfaite du don divin. On peut appeler ce nouveau régime l'alliance nouvelle, au sens où le chrétien est une créature nouvelle, c'est-à-dire au sens où pour le chrétien les promesses anciennes sont eschatologiquement réalisées par le don gratuit de la vie divine. Mais avant de parvenir à cette formulation, il paraît nécessaire de passer par l'affirmation intermédiaire correspondant au tragique de la croix : c'est parce que les hommes, en tuant le Christ, ont déchiré l'alliance et la promesse, que la gratuité absolue de Dieu se manifeste dans la croix. Dieu s'y révèle comme amour kénotique, et il offre gratuitement le salut à tout homme qui accepte de croire à cette folie et à cette faiblesse de Dieu manifestées par la mort du Christ (1 Co 1,25). Est-il suffisant de regarder la croix comme une sorte de parenthèse en attente de la résurrection ? Ne faut-il pas au contraire la considérer comme un événement décisif chargé d'une révélation spécifique ? Paul, en effet, sous une forme passionnée, avec une grande cohérence logique, refuse de considérer la croix comme un événement effacé : "O Galates stupides, qui vous a envoûtés alors que sous vos yeux a été exposé Jésus Christ crucifié ?" (Ga 3,1).
Dans cette épître aux Galates, problèmes concrets et théologie de la croix se rencontrent, ce qui donne une première approche de ce qui sera développé en Romains. Cependant il faut insister sur deux différences importantes entre Galates et Romains :
a) En Galates se trouve examiné seulement le problème immédiat et concret de la vie chrétienne : le Juif devenu chrétien et le païen devenu chrétien sont-ils tenus d'observer la Loi ? Ce problème, dans Romains, correspond aux chapitres 5 à 8.