Auparavant, dans cette épître, Paul examine la question de l'entrée dans le processus du salut, et à partir de 9 il réfléchit au destin d'Israël, c'est-à-dire à la cohérence du dessein de Dieu.
b) L'ampleur des questions abordés en Romains permet à Paul de modifier le levier de son argumentation. En Galates c'était la liberté chrétienne qui lui permettait de progresser dans son raisonnement (voir Ga 2,4). Dans Romains la question de l'entrée des païens et des Juifs dans le processus du salut l'amène à mettre en valeur la gratuité de la justification. Ce thème de la gratuité va servir alors de clef pour développer l'argumentation concernant la vie chrétienne.
Les deux épîtres se rejoignent quand il s'agit de critiquer la prétention théologique de la Loi à donner la vie. Paul dans l'épître aux Galates met en opposition le régime de la Loi et le régime de la foi. L'argumentation, parfois rabbinique et plus ou moins convaincante pour nos esprits occidentaux, ne laisse place à aucun doute sur cette opposition sans compromis. Parmi les divers motifs présentés, un paraît plus fondamental, encore faut-il bien le comprendre. En Galates 3,12 Paul cite Lévitique 18,5, texte sur lequel il s'appuiera encore en Romains 10,5 : "Celui qui pratique les préceptes de la Loi vivra par eux" ho poièsas auta zèsetai en autois ce qui correspond au texte massorétique ya'asèh 'otâm hâ'âdâm wâhay bahèm. Comprenons bien que dans la pratique de la Loi conçue comme un moyen de parvenir à la justification Paul ne dénonce pas un orgueil moral, mais un orgueil théologique, ce qui est bien différent. Cette pratique peut s'accompagner d'un grand élan d'amour et de reconnaissance pour le Seigneur qui dans sa miséricorde a donné à Israël ce moyen de lui être fidèle. Cependant pratiquer la Loi et penser que par là on puisse atteindre la Vie, voilà l'illusion que Paul dénonce. Dans cette perspective il ne s'agit pas seulement de repousser les lois cérémonielles, les excès juridiques, les préceptes alimentaires ; c'est toute la Loi, c'est toute loi, même celle qu'on pourrait à tort appeler la loi évangélique, qui se trouve condamnée. En effet, l'homme ne se sauve pas lui-même en pratiquant la Loi, il est sauvé gratuitement par Dieu en Jésus Christ qui révèle cette gratuité et offre ce don.