Précisons la place et le rôle des œuvres dans la théologie de Paul. Les ennemis de Paul l'accusaient sans doute d'encourager les chrétiens à vivre sans aucune obligation, sans aucune contrainte, bref en libertins. Évidemment c'est totalement faux : pour Paul les obligations chrétiennes sont bien là pour guider les œuvres de chacun. Mais, en comparant le régime de la Loi et celui de la foi, on constate que les obligations concernant la manière de vivre changent de place si l'on peut dire : au lieu d'être préalables au salut, elles deviennent une conséquence du salut accordé gratuitement. Du coup il convient d'une part, pour éviter toute confusion, de ne pas donner à ces obligations le nom de Loi, d'autre part de bien voir que le contenu de ces obligations change nécessairement : la première obligation du chrétien est d'imiter le Christ, en particulier son amour kénotique, avec toutes les conséquences qui en découlent pour le détail de la vie. Il n'est donc pas question de s'aligner sur une loi quelle qu'elle soit. Quand Paul doit résoudre des problèmes concrets, comme par exemple dans les épîtres aux Corinthiens, il ne s'appuie pas sur la Loi mosaïque, pas même sur le Décalogue. Il réfléchit à nouveaux frais en partant du Christ. Rien ne l'empêche bien sûr, à l'occasion, de s'inspirer de la Loi mosaïque, mais d'une part il subordonne tout au Christ et au salut gratuit, d'autre part, sans se limiter à la Loi mosaïque, il s'inspire aussi des données du stoïcisme et de la sagesse grecque. Dans chacune des lettres de Paul on constate que les conseils à l'impératif ne manquent pas, mais ils sont toujours la suite et la conséquence du salut gratuit, décrit à l'indicatif. Toutes les premières épîtres de Paul préparent sur ce point la construction générale de l'épître aux Romains, où la partie parénétique des chapitres 12 à 15, loin de constituer une annexe facultative, fait partie du schéma de l'épître, mais comme une conséquence du salut gratuitement donné.

 

Nous sommes ainsi amenés à examiner l'attitude de Paul par rapport à l'Ancien Testament. Dans celui-ci on peut et on doit distinguer deux points de vue : un aspect normatif et un aspect prophétique.