Enfin la doxologie finale est centrée sur la proclamation de l'Evangile aux peuples païens (16,26) ; cependant ce passage a peut-être été ajouté ultérieurement. De même il est difficile de tirer des conclusions à partir des noms propres du chapitre 16 : beaucoup sont d'origine grecque ou romaine ; quelques-uns d'origine juive. Mais ces salutations appartiennent peut-être à la "seconde édition" de cette épître, envoyée à la communauté d'Ephèse, où Paul connaissait beaucoup de personnes, tandis qu'il n'a fait aucun séjour à Rome.
A partir de ces constatations on peut
légitimement conclure que la communauté de Rome
était mêlée quant à son origine ;
cependant les chrétiens d'origine païenne étaient
sans doute nettement plus nombreux que les autres (voir
1,5-6;14-15).
Ces deux versets, avec plusieurs formules étonnantes, méritent une analyse précise : pourquoi employer cette tournure "ne pas avoir honte de l'Évangile" ? Pourquoi utiliser le mot "Évangile" de manière absolue sans autre précision ? Pourquoi et comment considérer l'Évangile comme une "puissance de Dieu" ? Que signifie cette expression "de foi en foi" (ek pisteôs eis pistin) ? Que signifie la citation d'Habaquq ? Est-elle faite sur l'hébreu ou sur le grec ? Quelle est finalement la portée de ces deux versets par rapport à l'ensemble de l'épître ?
Commençons par la dernière question. Ce petit passage se présente comme l'énoncé d'une thèse qui sera développée dans les 8 premiers chapitres. Souvent on se demande quelle est la place des chapitres concernant le destin d'Israël et le dessein de Dieu (9 - 11), ainsi que l'agir chrétien (12 - 15) : appartiennent-ils vraiment à l'épître ou bien sont-ils à considérer comme de simples annexes ?
Avec une bonne volonté un peu exagérée on s'efforce souvent de leur donner une importance qui va à l'encontre des indices présents dans cet écrit. Certes, ces deux parties (destin d'Israël, agir chrétien) ne sont pas des annexes ; elles s'insèrent parfaitement dans la suite des préoccupations de l'épître. Il n'en reste pas moins que le cœur de cet écrit est constitué par les 8 premiers chapitres. C'est ce qu'on peut déduire de la formulation de la thèse ici présente, qui manifestement annonce ces 8 chapitres et eux seuls directement.
"Ne pas avoir honte de l'Évangile", s'agit-il seulement d'une formule contournée pour affirmer sa fierté, ou bien plutôt avons-nous ici une allusion au mystère pascal centré sur la Croix ? Celle-ci fut pour les premiers chrétiens une cause de scandale et de honte. De multiples façons on cherche à atténuer cette infamie et à minimiser sa portée. Pour Paul au contraire, comme on peut le constater en lisant le premier chapitre de 1 Co, "le langage de la croix" est "puissance de Dieu" (1 Co 1,18) ; pour lui il y a dans la Croix une révélation, qui est une puissance de salut. Au moment où par la mort du Christ une rupture surgit, Dieu apparaît avec son amour universel, sans limites, sans conditions.
L'emploi absolu du mot "évangile" sans détermination est sans doute propre à Paul, encore qu'on le rencontre aussi chez Marc.