A partir de la place ainsi donnée à la foi, plusieurs conclusions apparaissent.

- Conséquence de ce salut gratuit : non pas la possibilité de faire n'importe quoi, mais l'obligation d'agir selon l'Esprit en conformité avec notre salut en suivant le Christ.

- L'obligation a changé de place : au lieu d'être un préalable dont dépendait la vie, elle est la conséquence d'un salut gratuit. Pour Paul il n'y a aucune équivalence entre foi et Loi. Continuer à appeler loi cette obligation, c'est entretenir une ambiguïté dommageable pour la doctrine paulinienne.

- Le contenu de l'obligation change. En effet le principe de ces obligations n'est plus la Loi, mais l'exemple donné par le Christ et l'action de l'Esprit. Quand ses interlocuteurs posent à Paul des problèmes concernant la vie chrétienne celui-ci évite de se référer au décalogue (Ex 20,1-17; Dt 5,6-21). D'ailleurs en s'alignant sur ces textes on aboutirait à des impasses : que faire de l'obligation du sabbat ? Comment accepter que l'adultère soit interdit sous le prétexte qu'il ne faut voler à son voisin ni sa femme, ni son champ, ni son âne ! Il ne s'agit donc pas d'épousseter le décalogue ou de le rajeunir un peu ; c'est tout son esprit qu'il faut changer. C'est bien déjà le sens du discours sur la montagne de Matthieu 5 : il ne s'agit plus seulement d'éviter le meurtre, mais toute injure envers son frère ; il ne s'agit plus seulement d'éviter l'adultère, mais toute convoitise dans son cœur. La Loi, comme préalable et condition pour entrer dans la vie, comportait des interdits et des commandements précis et limités ; les obligations chrétiennes, fondées sur la vie à la suite du Christ et sur la révélation contenue dans la croix, ne peuvent comporter de limites ; elles obligent à devenir parfait comme le Père céleste est parfait. Bien plus il est nécessaire de considérer ces obligations comme des conséquences du salut donné. Cette "utopie" est dangereuse : il serait plus sage de mettre des digues pour arrêter la violence : il serait bon parfois pour les chrétiens de prendre conscience de la folie de leur entreprise.