Enfin pour mieux comprendre l'importance de la discussion dans laquelle nous nous sommes engagés, et en même temps présenter un argument théologique, on peut réfléchir sur l'image de Dieu qui nous est donnée selon les deux cas envisagés. Si l'on voit dans les représentations sacrificielles de la mort du Christ un véritable énoncé théologique, on obtiendrait une certaine image de Dieu, dont la "colère" est "apaisée" par le sang de son Fils ; on a beau ensuite nuancer cette affirmation fondamentale qui appartient de plein droit à la conception des sacrifices, on a beau corriger, ou bien on sort des catégories sacrificielles, ou bien on reste prisonnier d'une certaine image de Dieu. L'histoire des doctrines et des mentalités chrétiennes concernant l'idée qu'on se fait de Dieu est là pour nous dire que ce danger n'est pas illusoire. Or qu'y a-t-il de plus important dans la Révélation si ce n'est cette nouvelle image de Dieu apportée par Jésus. Au-delà des métaphores, légitimes et pleines de significations en tant que telles, la mort du Christ apparaît comme la révélation de l'être profond du Fils de Dieu et de son Père : ce qui les rapproche et ce qui les définit c'est le même amour kénotique pour les hommes, offrant gratuitement le pardon et le salut. C'est seulement à partir de là que la foi (au sens paulinien), sans compromission avec la Loi et ses ombres sacrificielles (He 10,1), peut être comprise comme une voie d'accès à Dieu 21.