2) Y a-t-il continuité entre la tradition juive concernant Dieu et la "théologie" de Jésus ? Oui, répondraient sur ce point Bultmann, Conzelmann, ainsi que Mussner et Cazelles.

Pour d'autres auteurs (ainsi Becker), Jésus a apporté en ce domaine quelque chose de si nouveau qu'on peut y voir une des raisons de sa mise à mort.

Voici par exemple la position de Conzelmann : "Jésus n'entend pas enseigner une nouvelle idée de Dieu, mais inculquer ce qu'est le Dieu d'Israël, le Créateur, celui qui dirige le monde, donne des lois et juge - non dans son essence métaphysique ... - mais pour chacun des hommes" (Théologie du N.T., trad. fr. 1969, p. 114). Quelques pages plus loin, il précise et prolonge : "En entendant les exigences de Dieu, l'homme est placé dans une situation où il ne lui reste qu'à demander à Dieu son pardon ... Dieu n'est pas un oracle qui donne des renseignements sur la question générale du sens de la vie et du monde. Mais dans la mesure où l'homme peut se considérer comme son enfant, cette question du sens de l'existence est dépassée" (p. 120). Cette position est cohérente. Plusieurs éléments sont intéressants, mais sa présentation du Dieu de Jésus Christ est tristement réduite.

Essayons plutôt d'examiner les deux problèmes soulevés :

1) Si l'on trouve peu de discours, définitions et réflexions sur Dieu dans le N.T., il reste qu'à chaque ligne des évangiles on nous présente les gestes et les paroles de Jésus. Or le N.T. ne cesse d'affirmer que ce Jésus est le Fils de Dieu, son image, son Verbe. "Qui m'a vu a vu le Père" dit Jn 14,9 ; les synoptiques disent l'équivalent : "Celui-ci est mon Fils bien-aimé, écoutez-le" (Mc 9,7). N'y a-t-il pas des conséquences à tirer de ces présupposés quand il s'agit de présenter le Dieu de Jésus Christ ? Par ailleurs dans cette tâche nous sommes aidés aussi par les progrès de l'exégèse, plus soucieuse qu'autrefois d'analyser la théologie des récits évangéliques, comme ceux qui décrivent le pardon du paralysé, l'appel des pécheurs, le lavement des pieds, les outrages et la croix.